La filière sport retient son souffle

[Février 2021] La crise sanitaire a changé la donne pour la filière sport : de quelle manière ? Avec quelles conséquences ? BPCE L’Observatoire apporte un nouvel éclairage.

Une activité économique en forte baisse

Selon les estimations de BPCE L’Observatoire, la filière sport enregistrerait une chute d’environ 21 % de son activité en 2020 par rapport à 2019, soit une récession beaucoup plus profonde que celle estimée sur l’ensemble de l’économie (- 8 % selon l’Insee). Si l’on tient compte de la croissance qui était attendue en 2020, la perte d’activité liée à la crise sanitaire peut être évaluée à 25 %. Une entreprise du sport sur quatre déclare un recul supérieur à 50 %. Les situations critiques ne sont donc pas exceptionnelles.

Source : enquête BVA-BPCE

Des facteurs de résilience

Paradoxe en cette période, le nombre de créations d’entreprises reste élevé (les coachs et les professeurs de sport concentrent environ deux tiers des créations d’entreprises dans la filière ces dernières années, quasi exclusivement des entreprises sans salarié) et le nombre de défaillances, en baisse de 28 %, à son plus bas niveau depuis 10 ans (s’expliquant par les nombreuses mesures gouvernementales mises en œuvre, en particulier au niveau de la trésorerie).

La résistance à la crise diffère selon la taille des entreprises, les TPE-PME étant plus touchées, mais également selon leur stratégie de croissance. En effet, certaines ont privilégié l’endettement à la consolidation des fonds propres comme c’est le cas de certaines ETI, particulièrement des clubs professionnels (de football notamment) qui dépendent des recettes des droits TV et des billetteries.

Les associations face à des difficultés majeures

La crise de la Covid-19 n’a pas épargné les associations sportives dont la baisse moyenne des revenus est estimée à environ 30 % en 2020 par rapport à 2019.

70 % d’entre elles déclarent, en 2020, une baisse de leur budget, supérieure à 50 % pour 20 % d’entre elles. Cette forte sensibilité des associations sportives à la crise s’explique en partie par la structure atypique de leurs revenus, leurs ressources reposant moins sur des subventions publiques que sur les revenus des usagers (adhésions, organisation d’événements…), ce qui les expose aux aléas de l’environnement économique et les rend donc plus vulnérables à la crise actuelle. Enfin, à l’image de la situation vécue par les entreprises, la crise est d’autant plus forte que l’association est petite.

Source : enquête CSA-BPCE

Trésorerie, la préoccupation majeure

Les deux principales difficultés rencontrées par les entreprises, du fait de la crise sanitaire sont la baisse de la demande et les problèmes de trésorerie. Les préoccupations sur l’endettement et les fonds propres restent en retrait, ce qui montre que les entreprises restent marquées par l’impératif de survie.
Les entités plus petites, spécialisées dans l’enseignement ou les salles et les clubs de sport, sont plus sensibles aux questions de trésorerie tandis que les structures de taille plus importante, la fabrication et le commerce de gros, se projettent davantage dans les modalités et les incertitudes de la reprise d’activité. Interrogés sur la solvabilité de leur entreprise, 70 % des dirigeants ont un jugement réservé sur la solidité de leur bilan et 23 % le jugent fragile.

Les aides gouvernementales jugées indispensables 

La quasi-totalité des entreprises et des associations employeuses disent avoir eu recours à l’une des aides gouvernementales, la nature des aides variant en fonction de la taille de l’entreprise et dans une moindre mesure, de l’état de son bilan. La demande de Prêts Garantis par l’Etat (PGE) croît avec le chiffre d’affaires et la solidité du bilan des entreprises, mais plus ils croissent, plus les entreprises constituent des réserves de trésorerie. Ainsi, 57 % des montants des prêts étaient encore disponibles fin 2020, selon l’enquête BVA-BPCE.

Source : enquête BVA-BPCE

L’accélération de la digitalisation mais une diversification de l’offre limitée

La Covid-19 a accéléré le processus de digitalisation des acteurs du sport dans la mesure où ces outils se sont révélés nécessaires pour assurer la continuité de l’activité de la plupart d’entre eux. Plus de la moitié des entreprises du sport étaient ainsi digitalisées à la fin de l’année 2020 et nombre d’associations sportives, peu engagées sur la voie du digital avant la crise, ont proposé du coaching à distance ou une plateforme de cours en ligne depuis la crise. La mise en place des outils digitaux et leur utilisation accrue ont ainsi été une des conditions de survie à la crise pour la plupart des acteurs du sport. 

Fin 2020, seulement 40 % des entreprises avaient amorcé un processus de diversification de leur offre, plutôt pour accompagner la mutation de la demande que pour répondre à la crise. Leur diversification devrait s’accélérer au sortir de la crise.

Un rapport différent au sport

Interrogés sur les évolutions à venir de la pratique sportive, les acteurs du sport anticipent une accélération des tendances déjà observées (notamment le fait que l’activité physique est davantage pratiquée aujourd’hui pour améliorer sa qualité de vie ou sa santé que par goût de la performance). Les associations sportives en particulier prévoient une hausse des pratiques sportives « à la carte » et des cours individuels, en ligne avec les attentes de flexibilité et d’autonomie des pratiquants. Si tous ne se sont pas adaptés à ces évolutions, ils ont néanmoins conscience de la nécessité de devoir adapter significativement leur offre. Pour l’ensemble des acteurs du sport, une utilisation accrue des outils digitaux devra irrémédiablement accompagner ces nouvelles tendances, que ce soit pour l’organisation d’évènements sportifs avec l’utilisation d’applications digitales ou pour la pratique elle-même avec le coaching en ligne et l’utilisation accrue d’objets connectés.

Toujours un fort engouement autour de Paris 2024 

82 % des associations et 89 % des entreprises considèrent que l’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques de  Paris 2024 est une bonne chose, voire une très bonne chose pour la moitié d’entre eux. L’échéance est aussi très majoritairement envisagée comme un moment de reprise, voire de démarrage d’un nouveau cycle du sport. En effet, 70 % des entreprises sont confiantes dans « la capacité des Jeux Olympiques et Paralympiques à re-booster la filière sport » après la crise, et 42 % des associations pensent qu’ils constituent « une opportunité pour pallier les conséquences de la crise sanitaire ».

Un retour à la normale en 2022 ?

74 % des entrepreneurs du sport se déclarent confiants quant à l’avenir de leur propre entreprise et 66 % estiment que la filière dans son ensemble a la capacité de renouer avec la croissance à moyen terme. Toutefois, le degré de confiance des entreprises en l’avenir augmente avec la taille et dépend de l’intensité du choc récessif subi. Malgré ces disparités, le retour à la normale de l’activité est envisagé pour près de 80 % des entreprises du sport au plus tard à la fin 2022. Les associations, quant à elles, sont plus nombreuses à craindre un recul qu’à envisager une hausse de leurs principales sources de financement (subventions publiques, adhésions, recettes liées à des événements et sponsoring privé) pour la saison 2022-2023.

Vers des changements de modèle…

Toutefois, pour les acteurs du sport, ce retour à une activité normale plus ou moins rapide et difficile passera le plus souvent par des changements structurels de leur activité : 44 % pensent que leur business model va devoir significativement s’adapter aux mutations actuelles et 15 % pensent même qu’ils devront complètement se réinventer, surtout les clubs et salles de sport. Le sport est entré avec la crise sanitaire dans une période de turbulences probablement durable, mais les acteurs de la filière sont lucides et ont déjà entamé leur transformation.

Source : enquête BVA-BPCE

A télécharger

L’étude complète [Février 2021]

DOCUMENT PDF – 1,9 MB