Nous avons trouvé contenus pour ""
Désolé, nous n'avons pas trouvé de résultat. Veuillez poser une autre question.
Cette recherche n'a pas pu être traitée en raison d'un trop grand nombre de tentatives en peu de temps. Veuillez réessayer plus tard.
sur
[Janvier 2023] Aspiration des ménages à épargner mais forte remise en cause de leur capacité à y parvenir, placements financiers à des niveaux très élevés et surplus d’épargne non consommé, environnement économique incertain : l’inflation continue de réactiver les comportements d’épargne des Français.
La flambée des prix continue de réactiver les comportements d’épargne, en dépit de la sur-épargne accumulée pendant la pandémie estimée à environ 175 milliards d’euros cumulés de 2020 à 2022. Comme le montre la vague de novembre 2022 du baromètre BPCE-Audirep, l’inflation est devenue la deuxième motivation d’épargne des Français et ils estiment majoritairement qu’ils ne disposent pas d’une épargne de précaution suffisante pour faire face à la crise actuelle. L’enquête de conjoncture de l’Insee auprès des ménages l’atteste encore en décembre 2022 : l’opportunité d’épargner et les anticipations, devenues extrêmement fortes, de hausse des prix, avant et après l’agression russe de l’Ukraine, demeurent simultanément très élevées au regard de la moyenne passée. On assiste aussi à une augmentation simultanée des craintes sur le chômage – bien qu’à un niveau certes encore inférieur à la moyenne passée -, susceptible d’accentuer un comportement d’épargne de précaution, à mesure que l’économie ralentit. Le taux d’épargne des ménages devrait atteindre 16,7 % en 2022, très au-dessus de son niveau d’avant crise autour de 15 %, même s’il s’est réduit par rapport à 2020 (21 %) et 2021 (18,7 %). Il est remonté à 17,8 % au quatrième trimestre 2022, après 16,6 % au troisième trimestre, sous l’effet du rebond du pouvoir d’achat des ménages au second semestre.
Ce phénomène s’explique principalement par la volonté des ménages, notamment les personnes aisées qui sont à l’origine du surplus d’épargne et dont la propension à consommer est plus réduite que la moyenne, de reconstituer contre l’inflation leurs encaisses réelles, tant que persiste la confiance dans la monnaie. De plus, malgré la hausse des taux d’intérêt nominaux, l’insuffisance des rendements, surtout si l’inflation plus forte érode la valeur réelle de leurs actifs financiers, les pousse à maintenir une épargne d’autant plus abondante que ces personnes aisées anticipent des hausses futures d’impôts, face à la dérive des finances publiques. Dans un contexte d’incertitude et de lassitude face à la permanence des crises à répétition rapide, cette difficulté du taux d’épargne à décroître renforce la situation de stagflation dans laquelle semble s’installer l’économie française, un régime conjoint d’inflation forte, de croissance durablement faible et de remontée des taux d’intérêt, à l’exemple des années 1970.
Mesurés en excédents (flux hors intérêts et capitalisation des intérêts), les placements financiers, dont le surplus par rapport à la moyenne 2018-2019 peut être estimé à près de 146 milliards d’euros cumulés de 2020 à 2022, ont suivi l’évolution du taux d’épargne. Ils ont atteint un record absolu de 138,4 milliards d’euros en 2020, avant de reculer progressivement de 111 milliards d’euros en 2021 vers 93 milliards d’euros en 2022, tout en restant très supérieurs à la moyenne en euros constant de 44,4 milliards d’euros par an.
Conjoncturellement, la collecte nette cumulée de janvier à octobre des ménages sur les placements financiers a été de 71,7 milliards d’euros (hors titres), en baisse par rapport à la même période en 2021. Elle surpasse encore de 15 milliards d’euros la moyenne de janvier à octobre 2018 -2019. En revanche, au-delà d’une saisonnalité traditionnellement négative, le mois d’octobre a affiché une décollecte de 12,1 milliards d’euros, beaucoup plus marquée que la moyenne d’octobre 2018-19. Cette décollecte s’est expliquée majoritairement par les DAV (-15,8 Md€) et l’épargne-logement (-1,5 Md€) au profit des comptes à terme (placements à échéance à +3,4 Md€) et des livrets (+2,2 Md€ mais CSL à -0,6 Md€). Le contexte de hausse des taux d’intérêt semble repositionner les CAT dont la collecte, redevenue positive depuis mars, s’est accélérée depuis septembre. En outre, les relèvements des taux du LEP à 2,2 % en février et 4,6 % en août et des livrets A et LDDS (respectivement 1 % et 2 %) ont effectivement suscité une réallocation des plus en plus marquée des flux des ménages. La contribution de l’assurance vie (-0,3 Md€) a été négative, du fait des produits € (-2,6 Md€). A contrario, on assiste à un rebond de 1,4 milliards d’euros en novembre (1,7 Md€ en UC, -0,3 Md€ en €), après cinq mois de faiblesse. Les produits UC ont également été tirés par le développement du PER. En cumulé, on assiste à un basculement progressif des compartiments les plus liquides et mobilisables vers des produits à rendements plus élevés, avec un déplacement relatif des DAV, de l’assurance vie et des PEL au profit des livrets réglementés et d’une dynamique récente des CAT. L’encours de DAV progresserait plus modérément de 18 milliards d’euros, connaissant un ralentissement des flux sans sorties, du fait de l’effet d’encaisses réelles. Ces arbitrages n’apportent certes encore qu’une faible protection contre l’inflation, les rendements réels demeurant négatifs avec une inflation à 5,2 % en moyenne annuelle et à 5,9 % l’an en décembre 2022.
Après plus de trois ans de relative stabilité des taux, tels que perçus par les ménages, l’enquête de BPCE L’Observatoire menée en novembre montre une rupture dans leur appréciation. Qu’il s’agisse du livret A, des crédits immobiliers ou de l’assurance vie, les Français considèrent que les taux ont progressé d’environ 100 points de base au second semestre 2022. Ce passage de 2 à 3 % du crédit habitat dans l’esprit des Français a d’ores et déjà conduit les trois quarts des ménages ayant un projet d’achat à le reconsidérer, soit en le reportant, soit en l’annulant, soit en le modifiant.
Côté épargne, cette nouvelle courbe des taux implicite des ménages (avec le livret A à 2 % et l’assurance vie à 3 %) conduit à une réévaluation en profondeur des livrets défiscalisés. Mieux notés et en deuxième position derrière la résidence principale parmi l’ensemble des placements, leur valeur d’usage s’est rééquilibrée, valorisant mieux la dimension d’actif de rendement à côté de la sécurité, de la liquidité ou de la commodité. Interrogés sur leurs intentions de faire des versements ou des transferts vers les livrets A et LDDS, les ménages montrent bien par leurs réponses leur sensibilité au taux : en février 2022, 31 % d’entre eux l’envisageaient sur la base d’un taux à 1 %, en juin, sur la base d’une hypothèse de taux à 1,5 %, ce pourcentage passait à 46 % et, en novembre, ils étaient 58 % à l’envisager sur la base d’un taux qui passerait à 3 %. Les réponses par niveau de revenu et de patrimoine montraient par ailleurs que les plus aisés, concentrant l’essentiel de la sur-épargne antérieure, étaient de loin les plus sensibles à réallouer leurs placements. Une typologie des détenteurs de livrets A menée par BPCE L’Observatoire révèle enfin que l’essentiel de ces arbitrages serait le fait de détenteurs dont le montant moyen est sensiblement inférieur au plafond.
Cette sensibilité croissante des épargnants s’explique en partie par le fait que leurs comportements d’arbitrages ne sont pas linéaires. Comme le révèle le baromètre BPCE-Audirep, le taux de rémunération médian à partir duquel un détenteur de sommes inutilisées sur son compte courant est incité à les placer est proche de 3,5 %. Ce taux s’apparente à un seuil psychologique à partir duquel l’épargnant estime que l’effort d’arbitrage est suffisamment rétribué pour être mis en œuvre. Plus un taux nominal est proche de ce seuil, plus la probabilité qu’il provoque des arbitrages s’élève, cette probabilité étant très faible sous 1,5 %.
L’analyse économétrique comparée des impacts des deux derniers relèvements de taux confirme cette progressivité des arbitrages. Concernant les deux hausses récentes des taux réglementés au 1er février et au 1er août 2022, la sensibilité observée des épargnants semble plus marquée à mesure que les taux du livret A et du LEP dépassent un seuil psychologique de rémunération autour de 2,5 %. Cette non-linéarité peut être constatée en analysant l’impact différent sur trois mois de ces deux évènements au regard des tendances antérieures. En procédant toutes choses égales par ailleurs, c’est-à-dire en extrapolant les montants si les deux événements avaient concerné la même hausse des rendements (+100 points de base pour le taux du livret A, + 240 pb pour le taux du LEP), il est possible de comparer terme à terme, de façon homogène, l’impact des deux relèvements. Dans les deux cas, la somme des arbitrages a été nulle ne suscitant ni flux supplémentaire, ni réduction des placements. Il apparaît que le premier relèvement de taux a conduit le LEP (à 2,2 % en comparaison de 1 % pour le livret A) à concurrencer le livret A et le LDDS pour les clientèles modestes. Ces supports ont donc enregistré un impact bien inférieur aux références antérieures. Les livrets réglementés ont aussi fortement profité de la tendance à l’accélération de la décollecte sur le PEL. Les arbitrages habituellement attendus ont été modifiés pour l’assurance vie (nuls, du fait de l’élan des UC à travers le PER) mais sont restés relativement conformes pour les DAV. Le second relèvement (taux du livret A à 2 % et du LEP à 4,6 %) a été de plus grande ampleur puisqu’il a accru nettement le montant des arbitrages favorables pour les livrets réglementés, tout en pesant bien davantage sur les PEL mais surtout sur les DAV et l’assurance vie.
Au 1er février 2023, les formules de calcul donneraient un taux du LEP à 6,1 % et du livret A à 3,3 %, à moins que le plancher de hausse à 0,5 % soit appliqué, portant ainsi ce dernier à 2,5 %. La décision de s’en tenir à la règle et de limiter la hausse à 2,5 % ou bien de porter le taux à 3,3 % est éminemment politique. La perspective d’une hausse à 3,3 %, souvent envisagée, n’est pourtant pas neutre. Elle nuirait au financement du logement social et porterait un risque important d’engendrer des arbitrages potentiellement violents entre actifs, en raison des effets majeurs de non-linéarité à l’approche d’un nouveau seuil psychologique de rémunération de 3/3,5 %. Rappelons que, sur la base de modélisations économétriques établies sur le passé, seulement 30 points de hausse des taux réglementés induiraient, toutes choses égales par ailleurs, un impact de 11,2 milliards d’euros sur le total des livrets, dont 4,2 milliards d’euros pour le livret A, davantage aux dépens de l’assurance vie (-6,5 Md€) que des DAV (-3,8 Md€). L’impact sur le LEP serait a priori de +750 millions d’euros, avec des ressources provenant surtout du livret A, voire des DAV et des LDDS. Cependant, l’impact, qui devrait logiquement être multiplié par quatre, s’effectuerait sur un temps probablement beaucoup plus long, du fait de l’inertie des comportements d’arbitrage et du brouillage exercé par la flambée de l’inflation (rendements réels encore très négatifs), de l’ampleur successive et rapide des hausses de taux réglementés, de l’impact spécifique de la hausse plus élevée du taux du LEP et de la remontée des taux d’intérêt.
En 2023, les placements financiers ne reviendraient pas à leur niveau d’avant crise, même s’ils continuaient de diminuer en raison d’une part, du recul puis de la faiblesse du pouvoir d’achat des ménages et d’autre part, du ralentissement attendu de la distribution de crédits immobiliers, accentué cette année. Les arbitrages entre produits financiers, certes toujours guidés par l’attentisme, la recherche de sécurité et de disponibilité au détriment du risque, seraient cependant bousculés par l’ampleur des modifications brutales des taux réglementés et par le gain relatif croissant conféré par la défiscalisation. L’effet croisé d’un taux hors marché et d’un surcroît de rémunération nette de 30 % (en comparaison d’un actif soumis au PFU) contribue donc doublement à la compétitivité relative des livrets A, LDDS et LEP. Plus les taux réglementés s’approcheront ou dépasseront un seuil psychologique de rémunération situé autour de 3 %, plus les arbitrages vers ces produits seront massifs, avec des risques importants d’effets d’offres non mesurables sur les LEP, les livrets fiscalisés, les OPC monétaires et les obligations au détriment des DAV, des PEL, des autres livrets et de l’assurance vie en euros. En particulier, concernant le LEP, malgré un plafond fréquemment atteint, le nombre de détenteurs, proche de 7 millions, offrirait une marge de progression importante car il reste très inférieur au nombre de bénéficiaires potentiels (près de 15 millions), selon l’Observatoire de l’Epargne Réglementée de 2021. On continuerait d’assister également à un déplacement progressif des compartiments les plus liquides et immédiatement mobilisables vers les placements dont les rendements apportent aux épargnants un début de protection contre l’inflation, en raison des hausses successives de taux réglementés.
La réforme des retraites suscite avant tout de l’inquiétude chez les Français, en particulier chez les 50-64 ans et parmi les salariés du secteur public tandis qu’une forte minorité est sceptique quant à sa réalisation ou à son impact. L’argument selon lequel, elle pourrait contribuer à pérenniser le système actuel ne convainc que 20 % des Français, surtout des retraités. Même si l’enjeu politique de la réforme semble s’être déplacé vers la question de l’âge, cette inquiétude concerne pour beaucoup le montant de la pension, même si elle s’exprime de façon minoritaire, la majorité des Français choisissant plutôt une posture d’attentisme et d’incertitude.
Les aléas des annonces politiques ont toutefois peu d’impact sur les préoccupations des Français en matière de retraite. Quelle que soit la période, de façon assez stable depuis plusieurs années, 65 % des actifs se disent préoccupés par le niveau futur de leur pension et 70 % jugent prioritaires pour eux la constitution d’une épargne en vue de la retraite. Face aux enjeux multiples de l’allongement de la vie, l’épargne en vue de la retraite reste valorisée comme un choix d’autonomie. Grâce à la loi Pacte, avec 17 % de détenteurs et 20 % d’individus envisageant d’y souscrire selon le baromètre BPCE-Audirep, l’épargne-retraite individuelle est une modalité qui trouve enfin son public à côté de l’immobilier et de l’assurance vie.
Pour en savoir plus |
|
---|---|
Conférence de presse du 10 janvier 2023 DOCUMENT PDF |
Télécharger 3 Mo |
Conjoncture Epargne – décembre 2022 DOCUMENT PDF |
Télécharger 5 Mo |