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[Juillet 2024] Nos économistes, Alain Tourdjman et Julien Laugier, publient un bilan des défaillances d’entreprises au 2e trimestre 2024 : 16 405 défaillances sont dénombrées par BPCE L’Observatoire. Sur les 12 derniers mois, ce sont près de 63 000 défaillances qui sont dénombrées, un niveau supérieur de 21 % à l’avant crise. Une évolution globale qui cache de nombreuses disparités et surtout quelques signaux d’alerte, notamment sur les PME-ETI.
En début 2024, l’environnement économique des entreprises se stabilise, voire s’améliore à certains égards avec une progression encore sensible de l’emploi salarié (185 00 sur an au T1 2024) et un rebond du pouvoir d’achat des ménages depuis le T4 2023 grâce au reflux de l’inflation avec des prix à +2,1 % sur un an en juin 2024 contre +4,5 % en juin 2023. De plus, le taux de marge moyen des entreprises s’est sensiblement redressé, même s’il n’a pas conservé en début 2024 tous ses gains de 2023.
Néanmoins, le rythme d’activité semble se stabiliser autour de 1,2 % de croissance du PIB plutôt que s’accélérer et l’inflation dans les services, essentiellement d’origine salariale pèse sur les marges et limite les perspectives de baisse des taux directeurs à l’échelle de la zone Euro. L’incertitude politique ainsi que l’état des finances publiques pèsent également sur les taux longs, limitant le potentiel et la rapidité de la baisse des coûts de financement. Par ailleurs, les PME doivent composer avec des taux de marge très inférieurs au niveau moyen des sociétés françaises, notamment dans la construction et les services aux ménages. Elles continuent à privilégier une logique de consolidation financière avec une poursuite du recul du rapport dette / capitaux propres et le remboursement de plus de 55 % des montants de PGE dans un contexte où leurs perspectives d’activité et de trésorerie sont jugées médiocres et limitent leur investissement et leur recours au crédit. Seules 2,4 % des PME et 4,3 % des microentreprises craignent de ne pas rembourser leur PGE, mais les difficultés dans certains secteurs peuvent fragiliser les plus vulnérables, d’autant que l’Urssaf est revenue à des pratiques plus traditionnelles, après la parenthèse de la crise sanitaire.
Dans ce contexte, les défaillances d’entreprises ont poursuivi leur hausse depuis le début de l’année 2024. BPCE L’Observatoire dénombre 16 405 défaillances au 2e trimestre 2024 (+28 % par rapport au T2 2019), portant à 62 844 le nombre de défaillances1 en France sur les 12 derniers mois (+21 % par rapport à 2019).
Cette évolution met en évidence une forme de « rattrapage » des défaillances évitées de 2020 à 2022 et confirme certains signaux d’alerte déjà perceptibles antérieurement, selon Alain Tourdjman, directeur des Etudes économiques de BPCE et Julien Laugier, économiste à BPCE :
Globalement, les défaillances s’approchent d’un « record » au regard des 15 dernières années. Le 2e trimestre 2024 est le pire depuis 2009. Depuis le 4e trimestre 2023, le rythme de défauts est supérieur à la période 2010-2015, historiquement la plus dégradée depuis le début de notre suivi en 2009.
Certes, ce point haut s’explique en partie par un phénomène de rattrapage des défaillances évitées entre 2020 et 2022, phénomène qui n’est pas extrapolable, mais qui ne concerne pour l’instant que 22 % du potentiel de cette période. En fait, il existe une forte hétérogénéité entre les petites entités, très nombreuses, de moins de 3 salariés où le « rattrapage » n’atteint que 13 % et les PME où, statistiquement, presque toutes les défaillances de PME (93 %) évitées grâce au « quoi qu’il en coûte » se sont manifestées depuis 2023.
De fait, les défaillances de PME-ETI se maintiennent à un niveau élevé, 56 % au-dessus de celui de 2019, mais semblent se stabiliser. De manière générale, on observe trois situations différentes selon l’effectif :
L’impact en emplois, qui permet d’évaluer le poids économique des défaillances, se stabilise lui aussi à un très haut niveau du fait de la taille moyenne des entités concernées, soit 264 000 emplois menacés. Il s’agit d’un niveau très élevé, 40 % au-delà de 2019, dont plus de 62 000 sur le seul 2e trimestre 2024. L’impact économique des défauts ne faiblit donc pas en termes d’emplois menacés, et probablement aussi s’il était mesuré en termes de valeur, de créances, de capital, d’interactions interentreprises, … selon Alain Tourdjman et Julien Laugier.
L’analyse par taille laisse à penser que le haut niveau des défaillances ne s’explique pas par la multiplication récente des créations (la plupart du temps sans salarié). La mesure des défauts selon l’ancienneté de l’entreprise confirme cette hypothèse : la hausse des défaillances a bien davantage concerné des entreprises de plus de 3 ans, voire de plus de 5 ans tandis que les créations les plus récentes contribuent moins aux défaillances enregistrées qu’en 2015 et en 2019.
Par région, certains territoires se révèlent très vulnérables tandis que d’autres sont épargnés. Le quart Sud-Ouest (Midi-Pyrénées, Aquitaine, Poitou-Charentes) mais aussi Rhône-Alpes ou la Martinique sont très exposés, y compris sur le segment des PME-ETI. A l’inverse, les territoires les plus épargnés semblent être moins dynamiques économiquement (Lorraine, Limousin, La Réunion…). D’autres facteurs peuvent également expliquer les disparités territoriales, comme le degré de normalisation des recouvrements des Urssaf et aussi les spécialisations sectorielles.
Par secteur, on observe à des degrés divers les effets de l’inflation, de la hausse des taux et du changement de comportement de consommation des ménages. En particulier, certains secteurs connaissent à la fois un haut niveau de défaillances et une dégradation marquée depuis six mois : les activités financières et d’assurance, notamment de courtage et de conseil ; les transports routiers de marchandises ; l’immobilier (la promotion privée et les agences immobilières) ; certaines activités scientifiques et techniques (comme les activités des sièges sociaux, les relations publiques, les bureaux d’études et de conseils, l’ingénierie et les études techniques, les économistes de la construction). A l’inverse, les secteurs les plus résilients sont : la santé, l’enseignement, les activités récréatives (sports, arts, culture), l’industrie (hors agroalimentaire), les débits de boissons, les transports (non routiers), l’élevage agricole.
Les derniers chiffres conduisent à réévaluer légèrement à la hausse notre prévision pour 2024 (environ 65 000 évènements, contre 62 000 prévus auparavant) selon Alain Tourdjman. Au-delà des chiffres globaux, la typologie des entreprises défaillantes en 2024 devrait changer compte tenu …
1 A partir des données extraites et traitées par nos économistes, BPCE L’Observatoire est aujourd’hui en mesure de fournir une analyse statistique et économique très détaillée des défaillances d’entreprises.
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