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[Février 2024] Les travaux présentés ci-après procèdent de deux démarches complémentaires mais distinctes. D’une part, le Baromètre vendeurs s’appuie sur une enquête concernant les ventes réalisées en 2022-2023 et, d’autre part, l’étude de BPCE L’Observatoire se fonde sur les intentions de vente exprimées en novembre 2023.
Les vendeurs de logements forment une catégorie d’acteurs centrale, mais mal connue. La statistique publique ne produit aucune donnée sur les vendeurs. De leur côté, les acteurs du marché tendent à réaliser des études sur les acquéreurs plutôt que sur les vendeurs. Ainsi, le Baromètre « vendeurs » a été conçu pour combler cette lacune. Il porte l’ambition de suivre les vendeurs de logements et d’analyser leurs pratiques concrètes à travers une enquête par questionnaires récurrente à l’échelle nationale.
Le Baromètre « Vendeurs » a été créé et est animé par Alexandre Coulondre et Claire Juillard. Il est sponsorisé par BPCE L’Observatoire. Alors que la première vague du Baromètre, publiée fin 2021, couvrait la période 2020-2021, cette seconde vague se penche sur les années 2022-2023, qui représentent une étape charnière du marché du logement, durement éprouvé par la conjoncture.
On a tendance à envisager le marché du logement du point de vue de l’achat-vente de résidences principales. 48,7 % des biens vendus en 2022-2023 sont effectivement des résidences principales.
Mais une part très significative du marché se fait sur des biens qui ne sont pas des résidences principales. 19,3 % des biens vendus en 2022-2023 sont des résidences secondaires et cette part a même cru de 2 points depuis 2020-2021. Par ailleurs, 17 % des biens vendus sont des logements mis en location.
A l’étape de la mise en vente, les vendeurs tâtonnent et multiplient les points d’entrée sur le marché. Leur parcours est extensif et passe par la consultation de plusieurs intermédiaires de catégories différentes (agence immobilière, site Internet d’annonces entre particuliers, etc.).
Au bout du compte, les professionnels (agents immobiliers, mandataires, etc.) jouent un rôle central puisqu’ils permettent de trouver l’acquéreur définitif dans 69,7 % des cas. Ils représentent également la première source d’informations sur le marché pour les vendeurs. En particulier, c’est à eux que les vendeurs s’adressent en premier lieu pour s’informer sur les prix des logements.
Notons tout de même que, dans 10,7 % des cas, l’acquéreur se trouve par l’intermédiaire du bouche-à-oreille, de quoi souligner le poids du marché off dans le jeu de l’achat-vente de logements.
Dans 67 % des cas, on vend un logement pour acheter un autre logement. Dans le reste des cas, les ventes de logements n’irriguent pas directement le marché immobilier, mais répondent à d’autres enjeux tel qu’aider financièrement un ou des proches.
Si on se centre désormais uniquement sur les ventes de résidences principales, elles sont motivées dans 65 % des cas par l’achat d’une autre résidence principale. L’achat-vente de résidences principales constitue un marché en soi, avec sa logique propre.
Lorsque l’on considère cette fois la vente d’un bien en héritage, dans 45,7 % des cas, il ne se traduit pas par l’achat d’un autre logement. Cette part chute à 7,5 % lors de la vente d’une résidence principale. C’est dire que l’argent dégagé d’une vente n’est pas employé de la même façon selon son origine.
87 % des vendeurs se réfèrent à des informations de marché pour estimer le prix de mise en vente de leur logement. Ils tendent à combiner les informations et à consulter plusieurs types de références de prix : des prix des logements déjà vendus et encore en vente ainsi que des estimations et des prix moyens au m2. Ils se renseignent auprès des professionnels en premier lieu, mais empruntent aussi le canal digital pour relever des références de prix et procéder à des estimations automatiques.
12,9 % des vendeurs n’ont recours à aucune information extérieure. Cette part a reculé de 2 points depuis 2020-2021. On peut y voir l’effet de la politique d’open data et de la multiplication des intermédiaires sur le marché de l’information sur le canal digital.
La pratique consistant à ne pas recourir à des informations sur les prix des logements pour estimer le prix de son propre logement rappelle que la rationalité fondée sur l’alignement avec le prix de marché à un instant T, bien que majoritaire, n’est pas la seule.
Les vendeurs peuvent recourir à d’autres paramètres que le prix de marché pour fonder leur propre prix de mise en vente. Dans 32,4 % des cas, les vendeurs se réfèrent au prix d’achat de leur logement pour estimer son prix de vente. Dans 23 % des cas, ils tiennent compte des investissements réalisés pour améliorer leur logement.
Ces chiffres peuvent renvoyer à un effet cliquet et contribuent à expliquer pourquoi la baisse des prix ne survient que dans un second temps après la baisse des transactions à la sortie d’un cycle haussier.
Plus de la moitié des vendeurs (55,2 %) pensent avoir fixé un prix de mise en vente au milieu de la fourchette.
L’état perçu du bien est un critère très largement considéré par les vendeurs pour moduler le prix de mise en vente de leur bien. Les vendeurs d’un bien refait à neuf ne sont que 39 % à positionner leur prix au milieu de la fourchette, mais 41 % à cibler la fourchette haute. Inversement, le prix des biens à refaire ou à rafraîchir tend à se positionner en bas ou au milieu de la fourchette.
L’étiquette énergétique (DPE) est un élément désormais largement considéré lors de la vente d’un logement.
Seuls 11,9 % des vendeurs ne connaissent pas l’étiquette énergétique du logement vendu. La part des vendeurs qui considèrent que le DPE n’a joué « aucun rôle » a reculé de 3 points entre les deux vagues du Baromètre, pour s’établir à 31,9 %. Inversement, la part des vendeurs qui considèrent que le DPE a joué un rôle « significatif » a progressé de 3 points, pour s’établir à 21,2 %. Le DPE prend une importance grandissante. C’est une valeur montante.
Mais le rapport des vendeurs à cette étiquette laisse apparaitre des biais de perception. Le biais s’observe sur les étiquettes extrêmes. 13,5 % des vendeurs déclarent avoir vendu un bien d’étiquette A ou B alors que 6 % des biens vendus en France et 5 % du parc de logements appartiennent à ces étiquettes. Inversement, 9 % des vendeurs déclarent avoir vendu un bien d’étiquette F ou G alors que les transactions réalisées en compte 18 % et le parc 17 %.
Réel ou perçu, le DPE a une influence sur le prix de mise en vente. Les vendeurs qui considèrent avoir une étiquette énergétique plus performante se projettent davantage dans la fourchette haute de prix. 15,1 % des prix situés dans la fourchette haute sont associés à une étiquette A ou B, contre 11,9 % en moyenne. Inversement, 24,6 % des prix situés dans la fourchette basse sont associés à une étiquette E contre 19,4 % en moyenne.
Attention, l’effet du DPE n’est pas systématique. Le DPE interagit avec d’autres paramètres : l’état du bien, le prix d’achat initial et les investissements réalisés dans le logement, on l’a vu, mais aussi l’ensemble des caractéristiques du logement, sa localisation et les prix dans le secteur de vente, etc.
Le Baromètre Epargne & Placement BPCE/Audirep réalisé trois fois par an depuis 2019, auprès d’un échantillon de 2 000 Français de plus de 18 ans, vise à appréhender la perception du contexte économique par les Français, de suivre et anticiper les comportements d’épargne et de placement des ménages ainsi que, depuis 2020, leurs anticipations vis-à-vis de l’immobilier.
La vague de novembre 2023 a été réalisé à partir d’une enquête menée dans un environnement devenu plus défavorable à l’immobilier avec l’accumulation de facteurs qui ont détérioré le pouvoir d’achat immobilier des ménages (affaiblissement de l’économie française, montée des inquiétudes des Français vis-à-vis de l’avenir, inflation, inquiétudes croissantes sur l’emploi, hausse exceptionnelle et rapide des taux d’intérêt, resserrement des conditions d’accès au crédit à l’habitat). Malgré une perception de la conjoncture au plus bas, on constate que l’opinion des Français vis-à-vis du marché et des projets immobiliers évolue plus lentement.
Aussi, les intentions de vendre, correspondant aux projets en cours ou prévus dans les 12 prochains mois, sont plutôt en hausse, restant à un niveau élevé et même supérieur à leur tendance de moyen terme :
Interrogés sur leur perception de l’opportunité de vendre un logement en ce moment, les Français jugent généralement qu’il s’agit d’un mauvais moment pour vendre. Toutefois, le contexte apparaît moins dégradé aux yeux des futurs vendeurs qui, pour 33 % d’entre eux, pensent que le moment est bon pour vendre un logement, contre seulement 16 % de la totalité des ménages.
Même si elle résiste, l’image de l’immobilier s’est effritée au fil des mois depuis 2021/2022. Au terme de 2023, les intentions d’achat ne s’effondrent pas mais les projets en cours s’érodent, contribuant progressivement à peser sur les anticipations, alors que le volumes des transactions immobilières dans l’ancien ont fortement chuté en 2023.
Toutefois, les anticipations de prix des Français ne se sont pas encore retournées à la baisse. Globalement, les ménages anticipent de moins en moins des hausses de prix, 24 % pensent qu’ils pourraient augmenter modérément (14 % pensent encore qu’ils pourraient augmenter fortement) et, s’ils sont plus nombreux à anticiper des baisses de prix modérées (22 %, contre 4 % qui privilégient une forte baisse), la vision haussière continue à l’emporter.
Les futurs vendeurs, quant à eux, ont des anticipations proches de la moyenne des Français (40 % envisagent une hausse des prix immobiliers dans les 12 prochains mois, contre 25 % privilégiant une baisse). Cependant, contrairement à la moyenne de la population, leurs anticipations de prix ne se sont pas dégradées depuis juin et semblent plutôt en phase de stabilisation, perception sans doute confortée par l’opinion que le retournement des prix à la baisse n’est pas totalement reconnu ou accepté. En juin 2023, 26 % des futurs vendeurs envisageaient une baisse des prix dans les 12 prochains mois, ils étaient 25 % en novembre.
Le retournement conjoncturel du marché résidentiel s’accompagne de nouvelles préoccupations chez les futurs vendeurs, en particulier sur le délai de vente dont le risque d’allongement nourrit de plus en plus leurs inquiétudes, ainsi que la nécessité d’accepter une décote sur le prix de vente initialement espéré pour pouvoir conclure l’opération.
59 % des Français ayant un projet de vente en cours ou prévu dans les douze prochains mois expriment des craintes sur les délais de vente de leur bien, et 58 % anticipent une décote.
Et, dans l’hypothèse d’une difficulté à vendre le logement, 51 % des futurs vendeurs seraient prêts à accepter une baisse de prix tandis que 49 % d’entre eux privilégieraient l’attente et l’option d’un report ou d’un délai de vente plus long pour pouvoir vendre au meilleur prix.
En conclusion, dans les conditions actuelles, les Français qui alimentent ou sont susceptibles d’alimenter l’offre de logements anciens à court terme perçoivent majoritairement la nécessité de s’adapter aux nouvelles conditions du marché, mais sans basculer vers des comportements de vente à finaliser dans l’urgence.
Le DPE a pris une importance croissante comme critère de choix des acteurs du marché. Alors que les biens dont le DPE est classé F ou G ne représentent que 18 % environ des transactions, 48 % des vendeurs précisent que leur projet de vente est lié « au renforcement des contraintes sur les logements ayant une faible performance énergétique, notamment ceux classés F ou G » :
– d’une part, elle a tendance à accroître l’offre de propriétaires, notamment en collectif, qui anticipent une baisse de la valeur future de leur bien ou qui, bailleurs privés, préfèrent ne pas s’engager dans des travaux à la rentabilité incertaine,
– D’autre part, elle pèse sur les prix de vente en exerçant une pression supplémentaire liée au temps (avec le rapprochement des échéances sur le locatif) et liée à la valeur avec le coût des travaux nécessaires pour gagner au moins deux classes énergétiques.
L’intégration progressive des effets du DPE dans la détermination du prix d’un logement (potentiellement à la faveur du vendeur en cas de diagnostic favorable ou à la faveur de l’acheteur dans le cas inverse) intervient désormais dans un contexte conjoncturel de plus grande sélectivité qui pourrait contribuer à amplifier ses effets sur les prix des logements. Le facteur temps jouera en faveur des acheteurs et de leur pouvoir de négociation sur le prix, de même que l’évaluation du coût des travaux nécessaires au gain d’une ou plusieurs classes énergétiques pour les logements individuels soumis à l’audit énergétique.
Une typologie des vendeurs futurs a été établie à partir de deux types de variables déterminantes lors de la vente d’un logement, d’une part les attitudes, perceptions et anticipations explicatives du comportement des futurs vendeurs et d’autre part les caractéristiques des biens à vendre (type de résidence, DPE, localisation…). Deux principaux axes se dégagent, relatifs à l’attitude des vendeurs : l’un relatif au délai de vente acceptable (pressé ou non de conclure l’opération), l’autre concernant l’anticipation d’une décote potentielle par rapport au prix initialement espéré.
Quatre profils se distinguent :
Cette typologie traduit bien la place croissante du DPE comme critère d’arbitrage chez les futurs vendeurs. Les deux groupes les plus enclins à vendre rapidement, les « résolus » et les « optimistes » estiment respectivement à 73 % et à 61 % que leur projet de vente est lié au moins en partie au renforcement des contraintes de performance énergétique alors que, parmi les deux autres groupes, les « flegmatiques » et les « réalistes », ils ne sont que 8 % et 35 % à partager cette opinion.
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