Voile : Armel Le Cléac’h, retour aux bases
Armel Le Cléac’h, comme d’autres marins avant lui, n’a pas craint de remettre en jeu son statut pour affronter les jeunes talents de la voile dans la Solitaire du Figaro. Inenvisageable ou presque dans une autre discipline.
D’égal à égal…
La voile est décidément un sport à part. La victoire d’Armel Le Cléac'h dans la dernière Solitaire du Figaro en est un nouveau témoignage. Il suffit de faire l’effort d’imagination de comparer ce qu’il vient de réaliser et le transposer dans d’autres disciplines. Armel Le Cléac’h avait remporté cette épreuve pour la première fois en 2003 avant de la gagner à nouveau en 2010. La Solitaire du Figaro est une magnifique mais difficile épreuve de voile. Exigeante physiquement, éprouvante moralement, cette course par étape dans laquelle le sommeil est rare et les manœuvres nombreuses, est généralement considérée comme l’école qui révèle les talents. Ce qui a été le cas notamment d’Armel Le Cléac'h qui a brillé en Figaro dès ses débuts dans les années 2000. Il est devenu ensuite le grand champion que l’on connait, notamment vainqueur du Vendée Globe, de la Transat anglaise, détenteurs de nombreux records… Il pourrait légitimement se contenter d’observer depuis son Aventin les nouvelles générations arriver. Or, il n’a pas hésité – comme d’autres grands navigateurs tels Michel Malinovsky, Gilles Gahinet, Alain Gauthier, Michel Desjoyeaux, Jean le Cam…– à revenir se confronter aux jeunes pousses de la voile. Il n’a pas eu peur de mettre son statut en jeu. Dans un environnement du sport professionnel contemporain où l’on fait extrêmement attention à l’image, où les champions sont très contrôlés sur la manière de gérer cette image et leur carrière, voir ainsi l’un d’eux retourner aux bases de son sport pour lutter d’égal à égal avec des futurs talents force le respect. On n’imagine pas cela dans une autre discipline où un très grand champion viendrait participer à un championnat, une course ou un tournoi qu’il disputait étant jeune.
Multiples fonctions
D’autant qu’Armel Le Cléac'h est aussi devenu un mentor, avec le travail qu’il a entrepris avec le Team Banque Populaire auprès de Clarisse Crémer afin de la faire progresser et de la préparer pour le prochain Vendée Globe. On n’imagine pas non plus un grand coach d’une autre discipline redevenir anonyme et retourner dans une épreuve à la base de son sport. Armel Le Cléac’h a à cœur de transmettre ses compétences, de partager son expérience et d’accompagner Clarisse Crémer dans ce défi autour du monde. Moniteur de voile au début de sa carrière, Armel retrouve ainsi le plaisir de la transmission. Les marins sont ainsi parfois des athlètes, des entraîneurs, des managers d’équipe. Ils occupent plusieurs fonctions qui sont, dans les autres sports, dévolues à plusieurs personnes. C’est aussi en cela qu’ils sont des sportifs particuliers. Ce qui les oblige à faire preuves de qualités multiples et dont certaines sont parfois antinomiques. Par exemple, le besoin pour ces marins de se recentrer sur soi, comme le font tous les sportifs, mais aussi la nécessité pour eux de rester disponibles pour leur équipe qui travaille sur le bateau. C’est ainsi qu’Armel Le Cléac'h, après avoir gagné la Solitaire du Figaro pour la 3e fois – ce qui lui vaut grand respect et notamment des plus jeunes –, va retourner à son grand projet d’un nouvel Ultim qui sera mis à l’eau au printemps prochain. Non sans avoir ainsi fait preuve de cette humilité qui, au-delà de sa personne, est certainement la vertu cardinale des marins.
Retrouvez l’album photo de la Solitaire du Figaro
Crédit photo : Alexis Courcoux