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Photo de Maurice Manificat

Maurice Manificat, ski de fond : « Je suis un « lâche rien », un obstiné... »

À 37 ans, il est l’un des exemples de longévité à haut niveau du sport français. Quadruple médaillé olympique de ski de fond, Maurice Manificat, soutenu par la Caisse d’Epargne Rhône Alpes, continue d’évoluer au sommet, dans un sport magnifique et extrêmement exigeant. Il raconte les ressorts de ce parcours hors normes.

Comment êtes-vous venu au ski de fond ?

Habitant la Vallée de l’Arve avec mes parents et mon frère, à Thyez (Haute-Savoie), on était une famille sportive, plutôt tournée vers la montagne. On aime la nature. J’ai commencé le ski de fond avec l’école et je pratiquais le ski alpin en famille et avec les copains. Ça m’a tout de suite plu : on faisait le petit train dans les traces et on allait au centre nordique d’Agy au-dessus de Cluses qui est devenu mon club. C’était un ski de fond de proximité à un quart d’heure de route de la maison. J’aimais bien mais ce ne fut pas immédiatement une passion. Je m’y suis retrouvé naturellement, j’aimais skier dans les traces, j’avais le goût de l’effort. C’est comme ça que j’ai été détecté, j’ai été très vite devant, j’avais une facilité à l’effort. C’est mon maître d'école, Michel Petit, également membre actif du Ski club d'Agy, qui a proposé à mes parents que j’aille plus loin. J’ai franchi les paliers tranquillement, je n’étais pas le plus fort au début mais petit à petit, j’ai fait mon chemin. Je n’ai pas manifesté l’envie d’aller vers le haut niveau mais je m’amusais bien avec les copains. J’ai intégré sport-études au collège de Marignier, limitrophe de Thyez. C’était une classe multisport, en ski de fond, on était deux ou trois. On avait des aménagements horaires, on était dispensé de sport le lundi matin après nos week-ends de compétition et on était libéré le mercredi pour s’entraîner. À la fin du collège, les meilleurs de la catégorie d’âge qui en font la demande intègrent le lycée pôle Espoir du Fayet. À partir de 15 ans, j’étais donc dans un internat au pied du Mont Blanc. Ce fut ma première structure de haut niveau. C’était un ski-études, il y avait du ski de fond, du biathlon, du ski alpin. Ce furent de très belles années, celles où l’on fonde des amitiés durables. Mes meilleurs copains sont ceux de ces années-là. 

C’est là que vous avez basculé vers le haut niveau ?

Le haut niveau, on se rend compte de ce qu’on fait, ça devient sérieux. On commence à s’envisager un avenir. Mais je ne me voyais pas champion. Je regardais les grands évènements sur les chaînes publiques, Roland Garros, le Tour de France, les Jeux Olympiques. Ça me touchait. Quand je vois des jeunes aujourd’hui à qui je signe des autographes, je sens qu’ils ont envie de devenir champions, moi je n’avais pas cette âme-là. Je n’étais pas ultra compétiteur ; c’est venu en pratiquant. En gagnant par exemple les cross UNSS, j’y ai pris goût. Et puis, les entraîneurs nous enseignent les bases du haut niveau, comment mieux skier, optimiser la préparation. Après, ça a fait partie de ma carrière, la recherche de la perfection. Cela permet de performer mais aussi de ne pas tomber dans la monotonie, alors que le sport de haut niveau, c’est beaucoup de répétition, de routine - même si le ski de fond se pratique dans des décors qui changent… 

Cette quête de l’excellence, est-ce la raison de votre longévité ?

Je ne connais pas de lassitude. Je suis constamment en train de rechercher le meilleur. C’est ce qui fait que je suis toujours là aujourd’hui. Je n’ai toujours pas l’impression d’être au bout de ce que je fais. J’ai toujours été un battant, je ne lâche rien. Je n’ai jamais abandonné une course. Je suis toujours allé au bout, dans la joie comme dans la douleur… 

Le ski de fond est une discipline solitaire et pourtant il semble régner une ambiance assez collective ?

Le ski de fond est en effet un effort solitaire. Personnellement, je suis assez solitaire, je peux m’entraîner seul. En plus, enfant, j’étais assez timide. Mais l’internat, les stages avec le comité du Mont Blanc, la vie de club m’ont appris la vie en communauté. On était des petits groupes de cinq ou six par catégorie d’âge, on se forge alors des liens très forts. D’autant que c’est un sport d’endurance, les entraînements, ce n’est pas que du bonheur. On souffre ensemble, ça noue des amitiés. On se trouve en situation de confrontation mais on ne se marche pas dessus. Il y a surtout de la camaraderie et ça m’a sorti de mon tempérament solitaire, j’ai perdu ma timidité, je me suis ouvert aux autres, j’ai appris à faire les choses avec les autres. Le sport, c’est formidable pour cela. Et puis le ski de fond français a cette identité collective. Nos médailles aux Jeux Olympiques et aux championnats du monde, on les a gagnées avec ce fameux relais 4x10 km. Cette camaraderie se retrouve à tous les échelons…

Pouvez-vous nous en dire plus sur la spécificité de cette discipline ?

Il y a d’abord le lien avec la nature, quelle que soit la région, c’est un sport qui se pratique dans les grands espaces. Je réalise la plupart de mes séances sur le plateau du Vercors où je vis depuis 11 ans avec ma compagne. C’est un écrin de nature. Je pars pour des sorties de trois heures durant lesquelles on vit des moments de présence pure sur la technique mais aussi des instants où l’on peut aussi s’évader par la pensée. J’ai alors plein d’idées, je me nourris. Et puis c’est un sport individuel comme on l’a dit, mais qui se pratique beaucoup en équipe. On ressent fortement ce plaisir du collectif. Le plaisir de l’effort partagé. On aime se dépenser et se dépasser. On aime ressentir la douleur que provoque l’acide lactique. Après cet effort intense, on connaît physiologiquement des sensations de plaisir, de plénitude.

Avez-vous mené des études en parallèle ?

Mon premier objectif était de passer le bac… Je suis très scolaire et j’aime la science. Si je n’avais pas fait de sport de haut niveau, j’aurais certainement été ingénieur ou chercheur. Comme j’aimais particulièrement la biologie aussi, après le lycée, j’ai entamé une licence de biologie à l’Université Grenoble Alpes que j’ai faite en six années en raison de l’éloignement nécessaire pour faire des compétitions. J’ai poursuivi en Master 1 en 2011, et ensuite la carrière a pris énormément de place... Pour le ski, on part loin, on s’éloigne de la fac, sans oublier les contraintes extra-sportives du métier et puis l'arrivée de notre fils en 2014. Je ne voulais pas mentir aux enseignants et le temps me manquait. J’ai donc arrêté, mais j’apprécie de garder le lien avec l'Université via sa Fondation notamment.

Vous avez 37 ans et êtes toujours au plus haut niveau. Comment avez-vous procédé pour parvenir à cette exceptionnelle longévité ? 

D’abord le ski de fond n’est pas un sport à blessures graves, ensuite, on pratique en extérieur, sans être enfermé dans un stade ou une piscine… Nous évoluons en plein air. Toutefois, ce sont très souvent des entraînements biquotidiens. Ce qui pèse, ce sont les déplacements ainsi que la charge mentale de l’organisation et de la planification des entraînements. Car on s’entraîne tous les jours, même en vacances, je m’entraîne. Ça demande donc de l’organisation. Par exemple, lorsque l’on fait une sortie familiale le week-end, je me rends sur le lieu à vélo ou bien je prends les affaires dans la voiture et je rentre en ski-roues ou en course à pied. Il faut donc penser à la logistique car ce n’est pas juste une paire de baskets dans le coffre. Et puis il faut intégrer la nature de la sortie dans la planification globale de l’entraînement, varier les intensités, les distances… il faut tout anticiper !

Votre champion culte ?

Jusqu'à mes 20 ans, je ne connaissais pas les grandes légendes de notre sport. Plus tard en les côtoyant, des personnes m’ont inspiré, comme Vincent Vittoz. Gamin, je regardais les grands évènements sportifs à la télé et inconsciemment, j’ai certainement eu envie d’en faire partie. Ces évènements me donnaient de l’émotion. Aux Jeux Olympiques – qui sont de grandes courses –, c’est fort même dans les moments de détresse. Lorsqu’à Vancouver en 2010, on a terminé 4e, ce fut une grande tristesse mais cela reste des moments d’émotion. Et le sport c’est ça, de la grande émotion. C’est comme un très beau film, je peux pleurer… je ressens les choses, c’est ça l’important. 

La chose à laquelle vous pensez quand vous êtes dans le doute ?

Mon cerveau est toujours en bouillonnement. Quand je suis dans le doute, j’arrive très vite à trouver des ressources. Même si ça occupe toute ma vie, je ne suis pas fixé tout le temps sur mon sport. J’arrive à me détacher. C’est paradoxal car je vis et je dors « sport de haut niveau » mais j’arrive à m’évader. Alors quand je doute, je m’évade du contexte. J’arrive à repousser les pensées négatives. Je suis optimiste, voir utopique. Je relativise. Ce qui explique aussi pourquoi je dure, je passe vite à autre chose. Je peux faire un gros résultat et une semaine après parfois me retrouver au fond du classement, le corps ne veut plus… et ensuite en quelque jours, je peux repartir à la hausse. Une bonne course, il faut l’oublier. Il faut passer à autre chose quand ça va bien comme quand ça va mal. Je n’ai jamais ressenti le besoin de faire appel à un coach mental, je me nourris des autres. J’ai appris à accepter les phases de doute, de désillusion… Les échecs, c’est clairement le moment où l’on apprend le plus. Je crois me rappeler davantage des mauvaises courses que des bonnes… 

Votre point fort ?

Ma dimension physique, j’ai comme on dit une très bonne « caisse », je dispose naturellement d’un physique favorable pour les sports d’endurance. Ensuite, concernant l’aspect psychologique, je n’abandonne jamais. Je suis un « lâche rien », un obstiné. Je vais au fond des choses. Même quand ça ne sert à rien de continuer, je continue… Juste pour exploiter la moindre chance de réussite.

Si vous deviez retenir une valeur qui vous est chère dans le sport ? 

La camaraderie. On est un sport individuel qui se pratique en équipe, cette dualité nous colle à la peau. 

Avez-vous une autre passion ?

J’adore le bricolage ou inventer des choses. Faire des choses de mes mains. Réparer des vélos, des ordinateurs. J’adore aussi les trains miniatures. J’y joue beaucoup avec mon fils. J’ai retrouvé avec lui mon âme d’enfant… 

Et que représente le soutien de votre partenaire, la Caisse d’Epargne Rhône Alpes ?

J’ai des liens forts avec mes partenaires car on est proche. On noue dans notre sport des liens de proximité avec les gens. Quand on fait des compétitions, nous ne sommes pas parqués mais au milieu des gens qui ont accès à nous. On n’est pas hors sol. Même chose avec les partenaires, j’aime bien voir les gens, échanger. Et j’ai des partenaires de longue date. Je trouve ça important, on se sent soutenu… On pratique un sport très difficile et peu médiatisé. Mes partenaires, ce n’est pas frivole, ça me permet de vivre. En plus avec la Caisse d’Epargne Rhône Alpes, on a un lien avec le monde du travail, le monde réel. Car malgré tout, le sport de haut niveau, c’est une bulle au sein de laquelle on vit des choses extraordinaires mais déconnectées de la réalité. Donc, c’est bien, à travers ces liens et ces échanges avec les partenaires, de revenir à la réalité.

À noter que, pour la première fois de sa carrière, Maurice s’est imposé en janvier 2023 sur le marathon de Bessans en solitaire (42 km skate) qui fait partie, selon ses propres termes, « des références en France ». 

Parmi les différents partenariats qu’elle a bâtis, la Caisse d’Epargne Rhône Alpes a constitué une "team" d’une dizaine de champions issus des Équipes de France de ski et de snowboard dont fait partie Maurice. Ils portent haut les couleurs du ski français et de leur région et représentent des espoirs de médailles sur les compétitions internationales.

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