Nous avons trouvé contenus pour ""
Désolé, nous n'avons pas trouvé de résultat. Veuillez poser une autre question.
Cette recherche n'a pas pu être traitée en raison d'un trop grand nombre de tentatives en peu de temps. Veuillez réessayer plus tard.
sur
Jeudi 19 janvier 2023
Justine Braisaz-Bouchet, soutenue par la Caisse d’Epargne Rhône Alpes, évoque cette saison 2022-2023 si singulière dans sa vie d’athlète et de femme.
On se souvient de cette émotion, de cette formidable victoire de Justine Braisaz-Bouchet, dans la Mass-start des Jeux Olympiques d’hiver de Pékin en 2022. Elle est ainsi rentrée dans l’Histoire du sport français au terme de cette grande course. Au printemps dernier, elle a décidé avec son mari de fonder une famille. Enceinte, elle a suivi la saison 2022-2023 comme observatrice tout en continuant à s’entraîner et ce jusqu’au terme ou presque de sa grossesse.
Cela faisait huit saisons que vous étiez sur le circuit avec beaucoup d’intensité, des déplacements, des compétitions, des entraînements… comment vivez-vous ces moments en dehors de ce rythme intense ?
Au printemps dernier avec mon mari on a décidé de fonder une famille, j’ai fait un choix très personnel forcément mais également un choix professionnel qui consistait à faire une pause pour me relancer dans une olympiade avec en ligne de mire les Jeux Olympiques en Italie en 2026. Après, en effet, huit saisons sur la Coupe du monde, j’avais besoin de faire un break. C’était un sentiment personnel assez fort et partagé par mon mari. Donc, j’ai plutôt bien vécu ce changement de rythme. Ce qui a en fait le plus changé pour moi ce sont les déplacements qui ont été moins nombreux. Mais en termes d’entraînement, pour prendre en compte ce projet de poursuivre ma carrière après mon accouchement, je me suis entraînée correctement avec bien sûr l’aval et le contrôle du personnel médical. La grossesse se passait très bien et c’est allé très vite donc j’ai pu continuer à garder un bon rythme d’entraînement.
Vous aviez donc l’entraînement mais sans la compétition…
Exactement. J’ai continué pendant presque neuf mois, en revanche toute intensité était prohibée donc c’était assez basique…
Il n’y avait que le plaisir donc… Et vous n’aviez plus la pression de la compétition…
On peut dire ça, complètement. Même si je prends aussi du plaisir à l’entraînement pour les compétitions et même en compétition car je fais ça depuis que je suis petite.
Mais je me suis entraînée avec cette idée de poursuivre ensuite ma carrière et donc en me projetant sur les saisons à venir… Disons que j’ai profité de ma grossesse mais en ayant toujours un œil sur ma carrière.
Vous avez demandé des conseils à des championnes qui étaient passées par là ?
Oui, j’ai échangé avec Marie Dorin-Habert. On a dix ans d’écart, elle a eu une petite fille durant sa carrière. Je lui ai demandé un retour d’expérience ainsi qu’à Anaïs Chevalier Bouchet qui est une athlète toujours en activité et qui a eu une petite fille il y a trois ans. Ce sont des athlètes proches, qui font le même sport que moi C’était donc très intéressant d’avoir leur retour mais je me suis aussi fait confiance. Car cette réflexion de construire à long terme je l’ai depuis un bon moment. J’étais claire avec ce que je voulais faire.
Comment organisez-vous votre quotidien ?
Je suis beaucoup à la maison. Je vis en Tarentaise, proche de Peisey Nancroix et mes parents aux Saisies, donc j’alterne entre ces deux endroits qui sont deux très bon spots pour faire du ski de fond. Je m’entraîne une à deux fois par jour.
Vous allez vous entraîner jusqu’au terme ?
Tant que ça va je continue. Simplement je m’adapte. Quand je suis dans une période où je me sens plus fatiguée, j’allège mais sinon je n’ai pas levé le pied. Je m’écoute. Je me connais bien. Tant que la tête suit et que le corps sous le contrôle médical aussi, il n’y a rien qui me limite. Je me projette aussi sur les semaines qui arrivent et je me dis que de l’énergie il va m’en falloir pour m’occuper de ce petit bébé. Aussi l’idée est de ralentir progressivement jusqu’à la date de l’accouchement. Et puis je me laisse un mois ou deux pour me faire à cette nouvelle vie…avant de me projeter à nouveau dans ma carrière.
Si l’on compare avec vos entraînements habituels, vous situeriez l’intensité de vos sorties à quel pourcentage ?
Je dirais que je suis à plus de la moitié. J’essaye vraiment de conserver mes capacités physiques, physiologiques ou musculaires adaptées à la grossesse. Je dirais de 60 à 70 % en termes de nombre de sorties en revanche, en termes d’intensité, je les réalise de façon modérée à faible. Honnêtement, j’avoue que je me sens plutôt bien, je n’ai pas l’impression qu’il y a un énorme changement par rapport aux années précédentes.
Vous regardez les courses à la télévision ? Et quand vous voyez les autres biathlètes, est-ce que l’adrénaline de la compétition vous manque ?
Je n’en manque pas une. Ça me passionne et ça me manque un peu.
C’est marrant, parfois j’ai davantage envie en regardant une compétition à la télévision que certains jours de course où j’ai pu me retrouver avec un manque d’envie ou un stress si important que cela inhibait le plaisir et l’intensité de la compétition. Mais aujourd’hui, oui j’ai envie d’y revenir. Je vais prendre le temps mais je vais revenir. Je vis bien ma grossesse mais je me dis aussi, cool, je vais y revenir.
Comment avez-vous vécu la première étape de Coupe du monde de la saison ?
C’était très excitant. J’avais envie d’avoir le niveau. Ensuite je me suis beaucoup nourrie de ce que je voyais. C’était très différent de la manière dont je vivais les courses en compétition. Je me rends compte de chose de façon plus évidente que lorsque je suis en course. Par exemple, ce qui m’a frappé, c’est la simplicité du biathlon. Il y a de la technique, de la stratégie mais ce que cela dégage c’est une vraie forme de simplicité. Je m’inspire aussi d’athlètes qui performent aujourd’hui comme les Norvégiens. Je regarde le biathlon dans son ensemble. Et cela me montre que pour construire une course performante il y a quelque chose d’évident quand on le regarde à la télé et c’est une sensation agréable.
Vous continuez donc à vous entrainer devant votre télé en picorant des choses chez les autres qui vont vous permettre de progresser ?!
Complètement. C’est très complémentaire. C’est une autre approche que j’ai appréhendée cette année…
Vous êtes quel genre de téléspectatrice sur votre canapé ? Survoltée ou vous arrivez à prendre du recul ?
Un peu des deux. C’est vraiment très amusant, c’est assez intense quand je regarde une compétition. J’arrive à presque ressentir les émotions des athlètes, voire les décisions qu’ils prennent. Pas pour tout le monde mais les athlètes qui me parlent. J’arrive presque à ressentir en direct leur course, leurs choix, la construction de leur course…. Après je suis très frustrée de voir des tirs manqués. Donc je me rends compte de ce que les téléspectateurs peuvent vivre quand on est en compétition. C’est un peu la situation où une voiture double un vélo et un vélo qui se fait doubler par une voiture, j’ai actuellement les deux points de vue. Car observateur et acteur sont deux positions en totale opposition et c’est très enrichissant de vivre les deux côtés. Ça m’apportera à l’avenir.
Vous confirmez que c’est tout de même plus simple d’être sur son canapé et de commenter….
En fait, je me rends compte qu’en tant qu’athlète iI faut être capable de reproduire l’esprit du canapé c’est-à-dire être confiant, avoir de l’aplomb pour mettre en place des choses qu’on a travaillé, exprimer tout son potentiel. Car quand on est athlète, parfois on s’enferme dans une bulle de l’enjeu, ce qui peut être contre performant. C’est bon d’avoir un peu de simplicité….
Donc quand vous allez reprendre la compétition vous allez essayer de garder en vous l’esprit du canapé…
Oui j’essayerai d’utiliser mon expérience de téléspectatrice durant tout cet hiver.
Vous avez changé d’alimentation ou gardé votre alimentation d’athlète ?
Pour moi je continue mon alimentation pour des raisons notamment de santé et je le gérerai aussi de la même façon après ma carrière. C’est juste une question de bon sens.
La maternité a-t-elle changé la championne que vous êtes ? Votre rapport au sport, à la compétition…
On verra quand je reviendrai mais je n’ai pas l’impression. Disons que durant ma carrière, il y a eu des moments où l’enjeu prenait le pas sur le reste. Là, cela sera peut-être différent. Mais j’avais déjà pris du recul depuis l’année dernière. Sur ma carrière, ma façon d’aborder le sport, sur celle que je voulais être.
Aussi parce que votre titre olympique vous a apaisée…
Peut-être, oui. Il m’a donné envie de poursuivre et de rêver des Jeux Olympiques de 2026. Maintenant cette projection, le puzzle s’est construit avant la grossesse… C’est juste grandir et évoluer avec ou sans le sport mais à travers les personnes que je côtoie tous les jours. C’est aussi un projet familial.
Pensez-vous que votre parcours, votre décision de faire une pause pour mettre au monde un enfant dans votre carrière peut aider des jeunes femmes qui se posent ce genre de question dans leur vie professionnelle et qui subissent le poids ou la pression du plan de carrière, dans le monde de l’entreprise. Elles peuvent se dire, une championne qui a une carrière déjà très courte le fait, alors pourquoi pas moi…
Je ne sais pas si on peut répondre par oui ou par non à cette question. Avant moi, plusieurs athlètes dans le sport et dans le biathlon ont fait ça. Quand j’ai pris cette décision tous mes sponsors, et notamment la Caisse d’Epargne Rhône Alpes, m’ont soutenue. J’ai été claire avec eux sur mon projet de saison blanche avec l’objectif d’un retour pour la prochaine olympiade. Ils ont décidé de me soutenir et c’est une aide énorme dans le projet. Même si ma décision était prise, et je l’aurais prise même si je n’avais pas été soutenue, cela aurait simplement été beaucoup plus difficile. Pour les femmes qui se posent des questions, ça dépend du contexte. Moi, j’ai été très soutenue par mes partenaires et notamment par la Caisse d’Epagne Rhône Alpes et quand on est soutenu, on est serein. Et une mère sereine c’est une famille sereine, c’est un enfant serein. Et enfin, une mère de famille peut être plus efficace, plus professionnelle lorsqu’elle a fait ce choix.
On parle de charge mentale mais avoir un enfant et mener une carrière de haut niveau demande une énergie folle, vous vous êtes préparée à ce défi…
En termes de logistique, ça s’anticipe et j’ai l’aide de ma famille qui me soutient dans ce projet et particulièrement de mon mari. Sur la première année, on a tout organisé. Après je me donne le temps de me préparer, de faire les choses intelligemment, de m’adapter. Je suis prête ! Je sais qu’il y aura des moments émotionnellement durs, je l’imagine. Mais justement je vais prendre le temps notamment cette année qui va être une année charnière. Et on verra avec tout le staff de l’Equipe de France afin que tout le monde s’épanouisse au mieux.
Parmi les différents partenariats qu’elle a bâtis, la Caisse d’Epargne Rhône Alpes a constitué une « team » d’une dizaine de champions issus des Equipes de France de ski et de snowboard dont fait partie Justine. Ils portent haut les couleurs du ski français et de leur région et représentent des espoirs de médailles sur les compétitions internationales.
« La même flamme nous anime »