Voile : le Vendée Globe, la course d’entre les courses

Mardi 27 octobre 2020

Le Vendée Globe fête ses trente ans. L’occasion de revenir sur l’histoire de cette mythique course au large.

Un peintre pour premier vainqueur
C’est l’épreuve ultime, celle qui transcende tout. « Quand je décide d’y aller, explique Armel Le Cléac’h dans le supplément de l’Équipe pour les 30 ans de l’épreuve, dans mon imaginaire, le Vendée Globe ce sont des aventures incroyables, des sauvetages, des drames et le côté un peu mystique des mers du Sud. Voir les images de Thierry Dubois et Tony Bullimore, sauvés in extremis à l’autre bout du monde, dans des vagues impressionnantes…« . 
Le Vendée Globe est le sommet de la course au large pour les marins mais c’est davantage que cela. Cette course emporte tout le monde avec elle tant elle fait rêver bien au-delà des seuls amateurs de voile. Comme le souligne Armel Le Cléac’h, son histoire est émaillée d’épopées qui ont frappé les imaginations et inscrit à jamais cette épreuve dans la légende du sport et de l’aventure. Car c’est bien de cela qu’il s’agit. 

La première édition de ce tour du monde en solitaire et sans escale s’est élancée le 28 novembre 1989 des Sables d’Olonne dans une presque indifférence, en tout cas dans un enthousiasme populaire qui n’a vraiment rien à voir avec ce qu’il est devenu lors des dernières éditions… C’est un artiste qui a gagné cette épreuve inaugurale, un artiste qui avait quand même terminé 2e du Boc Challenge, un tour du monde en solitaire mais avec escales. Mais la victoire du peintre reconnu qu’est devenu Titouan Lamazou contribue aussi à la singularité de cette épreuve qui consacre des hommes et des femmes à part. Déjà, lors de cette première circumnavigation, il y avait eu un sauvetage incroyable qui en annonçait d’autres. Loïck Peyron avait sauvé Philippe Poupon qui avait chaviré à 2 000 miles du Cap de Bonne Espérance dans les quarantièmes rugissants… Toute la mythologie du Vendée Globe est déjà là. On est si prêt de l’Arctique qu’il n’y a pas de navigation commerciale, seuls les marins de la course pouvaient le sauver.

L’édition suivante est remportée par un marin aussi formidable qu’il est discret, Alain Gautier, qui appréhendait son retour à terre après trois mois loin des hommes. Cette édition va définitivement fonder la mythologie du Vendée Globe. D’abord, l’Américain Mike Plant n’a jamais atteint la ligne de départ… Il a disparu en amenant son bateau des États-Unis. Durant la course, c’est le Britannique Nigel Burgess qui a perdu la vie dans le Golfe de Gascogne. Mais ce qui va rester de cette épreuve c’est l’opération en plein océan de Bertrand De Broc qui a dû se recoudre la langue lui-même en consultant un médecin par… Telex.  

Des sauvetages légendaires
L’édition partie en 1996 et remportée par Christophe Auguin a été marquée par la disparition de Gerry Roufs et par le sauvetage incroyable et miraculeux de Thierry Dubois et de Tony Bullimore évoqué par Armel Le Cléac’h. Thierry Dubois sera retrouvé après des heures en perdition accroché à son safran dans un océan démonté et Tony Bullimore également, en hypothermie à l’intérieur de son bateau retourné. 

En 2000, Michel Desjoyeaux est le premier vainqueur à descendre sous la barrière des cent jours pour réaliser ce tour du monde. Il a vu revenir à ses trousses la jeune anglaise Ellen MacArthur qui, après cet exploit, deviendra une immense star outre-Manche. Et puis il y a la fabuleuse épopée d’Yves Parlier. Celui-ci casse son mat dans l’océan Indien mais ne renonce pas. Il atteint cahin-caha la Nouvelle-Zélande où il va confectionner un nouveau mat avec les débris de l’ancien pour reprendre la route. Il parviendra à rallier l’arrivée en 126 jours en se nourrissant d’algues et de poissons volants. Un nouvel acte de bravoure dans la légende du Vendée. En 2004-2005, on assiste à l’haletant mano a mano entre Jean Le Cam et Vincent Riou, remporté par ce dernier. 

Des histoires d’amitiés
Michel Desjoyeaux gagne pour la deuxième fois le Vendée Globe en 2008-2009 dans une course marquée par le calvaire de Yann Eliès qui s’est fracturé le fémur et le bassin en plein océan Indien et a dû attendre deux jours pour être secouru… On se souvient également du sauvetage de Jean Le Cam par Vincent Riou, ces deux mêmes skippers qui s’étaient bagarrés jusqu’au bout dans l’édition précédente. Une belle histoire d’amitié comme sait les écrire le Vendée Globe.

Le cru 2012-2013 voit la victoire du jeune prodige François Gabart qui triomphe dans le Vendée Globe à 29 ans. Une victoire acquise de haute lutte face à Armel Le Cléac’h qu’il devance de trois petites heures et donne encore plus de prix à son succès. Armel Le Cléac’h sera récompensé quatre ans plus tard par une magnifique victoire qui salue ses qualités de marin et sa persévérance. D’ailleurs 24h après son arrivée, il nous confiait : « Cette année mentalement, je suis allé très loin dans mes ressources. Je me suis fait violence car je me suis dit que je ne pouvais pas perdre cette course. Je me suis battu jusqu’au  bout…« . 

Ce ne sont en effet que des immenses marins qui ont remporté cette épreuve d’entre les épreuves. Mais cette course ne consacre pas que le premier. Non, tous ceux qui parviennent à revenir au port, à remonter le chenal des Sables après tous ces jours de mer, de lutte dantesque face aux éléments, en sont aussi les vainqueurs. Comme du reste ceux qui ont dû renoncer quelque part au prix de mille souffrances. D’ailleurs, comme à chaque fois, la foule, certes plus réduite que les éditions précédentes – Covid oblige -, les regardera partir le 8 novembre prochain à 13h02. Ce public saluera chacun des 27 hommes et des 6 femmes, dont Clarisse Crémer qui sera particulièrement suivie par son mentor Armel, qui auront l’immense courage de larguer les amarres pour cette folle et sublime aventure. 

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